Tout développement vraiment humain signifie développement conjoint des autonomies individuelles, des participations communautaires et du sentiment d'appartenance à l'espèce humaine.
L'homme raisonnable s'adapte au monde; l'homme déraisonnable persiste à vouloir adapter le monde à lui-même. C'est pourquoi le progrès ne peut venir que de ce dernier.
Quelle est la différence entre les maladies de l'âme et les affects? Je l'ai souvent indiquée, mais la rappellerai ici encore. Les maladies de l'âme sont les vices invétérés, endurcis, comme l'avarice, comme l'ambition. Ces vices enserrent l'âme dans leurs replis et passent à l'état de maux permanents. Pour en donner une définition brève, la maladie de l'âme consiste dans une perversion opiniâtre du jugement, qui porte à croire vivement désirable ce qui ne l'est que médiocrement; c'est, si tu préfères une autre définition, convoiter avec excès des choses à rechercher sans insistance ou à ne rechercher en aucune façon; c'est avoir en singulière estime ce qui ne vaut que peu d'estime ou point du tout. Les affects sont des mouvements de l'âme injustifiables, soudains, impétueux qui, répétés et négligés, font les maladies, de même qu'un catarrhe simple et accidentel produit la toux ; continu et chronique, la phtisie. Ainsi, les âmes qui ont fait le plus de progrès échappent aux prises de la maladie; elles ressentent encore des affects, si près qu'elles soient de l'état parfait.
Lorsque nous rencontrons un corps extérieur qui ne convient pas avec le nôtre, tout se passe comme si la puissance de ce corps s'opposait à notre puissance, opérant une soustraction : on dit que notre puissance d'agir est diminuée et que les passions correspondantes sont de tristesse. Au contraire, lorsque nous rencontrons un corps qui convient à notre nature, on dirait que sa puissance s'additionne à la nôtre : les passions qui nous affectent sont de joie, notre puissance est augmentée ou aidée.
Que répondre à un homme qui vous dit qu'il aime mieux obéir à Dieu qu'aux hommes et qui, en conséquence, est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ?
Je dirais que même la science produit de la poésie. Elles a déchiré aujourd'hui le voile d'un univers terriblement mécanique et monotone, qui était un univers purement ordonné, obéissant à des lois qui se répétaient sans cesse. Un univers qui commence par un coup de tonnerre, par un éclair fulgurant, c'est beaucoup plus beau que la Genèse. (..) Je trouve que l'histoire de l'univers est redevenue totalement fabuleuse, avec cette vertu d'être poétique, c'est-à-dire que la création y est mêlée à nouveau à son contraire, la destruction.
Mais la culture est indispensabe pour produire de l'homme, c'est-à-dire un individu hautement complexe dans une société hautement complexe, à partir d'un bipède nu dont la tête va s'enfler de plus en plus.